samedi 19 décembre 2009

Le Blackberry et Skinner


En 1972, j'ai suivi un cours universitaire de psychologie. Au programme, on a abordé en général le béhaviorisme et en particulier B. F. Skinner. J'étais si fasciné par ce psychologue américain et ses études sur le conditionnement opérant que je n'ai jamais oublié la matière, même après plus de trente ans. À mes yeux, le concept le plus intéressant de son ouvrage était celui qui portait sur le renforcement intermittent.

En un mot, le béhaviorisme analyse le comportement de l'individu. Contrairement à l'école freudienne qui cherche à expliquer la conduite de l'individu en fouillant dans les éléments internes à la vie mentale, le béhaviorisme se limite aux phénomènes observables, c'est-à-dire qu'on regarde ce que l'individu fait, on ne tient pas compte de ce que l'individu pense. En s'inspirant de l'ouvrage de Pavlov, M. Skinner est parvenu à appliquer l'idée de renforcement pour susciter une certaine action de la part de l'individu, indépendamment de sa volonté. Le terme « conditionnement opérant » veut dire qu'on a conditionné une réaction à un stimulus chez l'individu.

Le concept de renforcement est, je pense, assez facile à comprendre. On veut qu'un individu fasse telle ou telle chose, on récompense l'individu si l'individu fait la chose voulue, on ne récompense pas l'individu si l'individu ne fait pas la chose voulue : un renforcement positif ou négatif. Skinner a prouvé ses théories en créant ce qu'on appelle la boîte de Skinner. Il mettait des rats et des pigeons dans cette boîte pour les soumettre à des tests conçus pour déterminer leurs capacités à subir un conditionnement opérant, c'est-à-dire qu'il cherchait à savoir comment un stimulus renforçateur pourrait changer le comportement de l'animal. Par exemple, un animal apprend que s'il appuie sur un bouton, il reçoit un morceau de nourriture et s'il appuie plus fréquemment, il reçoit plus de nourriture. La nourriture, le stimulus renforce l'action de l'animal.

Skinner est arrivé à observer chez ces animaux comment le comportement désiré, appuyer sur le bouton, continue même si le renforcement, la nourriture, n'est pas offert à chaque fois. Skinner a changé la fréquence de la distribution de nourriture offrant, un morceau une fois sur deux, une fois sur trois, etc. Cependant, le comportement de l'animal ne changeait pas, il continuait à appuyer sur le bouton. C'est là que Skinner a codifié le renforcement intermittent.

Le cours universitaire en parlant de M. Skinner a évoqué l'application de cette idée au domaine des jeux. Il était facile de voir comment la machine à sous était l'équivalent d'une boîte de Skinner et le pigeon était l'homme lui-même. L'action désirée, introduire une pièce de monnaie dans la machine et tirer le levier continuait et le renforcement, le lot, n'était offert que de façon intermittente. Je ne fréquente pas les casinos, toutefois, au cours des années, j'ai eu quelques occasions d'y observer ce phénomène.

Il y a plusieurs années ma femme et moi avons visité les chutes du Niagara, ma ville natale, pour célébrer notre anniversaire de mariage. Nous avons eu de la chance ce week-end-là : Il faisait beau, il y avait du soleil, une journée parfaite pour flâner dans le parc Victoria à côté des chutes. À ce moment-là, on venait d'ouvrir un nouveau casino près des chutes et on parlait de comment cet établissement aurait un effet sur l'économie locale. Pendant notre ballade, nous avons décidé de prendre une quinzaine de minutes pour y aller et l'évaluer. Malgré le temps particulièrement agréable à extérieur, nous avons trouvé pas mal de gens à l'intérieur du casino plantés devant des « bandits manchots », des machines à sous, y insérant des pièces de monnaie les unes après les autres. Pour moi, c'était un spectacle bizarre. Je ne pouvais pas m'empêcher de penser à la boîte de Skinner et au fait que ces gens n'étaient que des pigeons appuyant sur le bouton dans l'espoir de recevoir leur morceau de nourriture. C'était le renforcement intermittent en action ! Très cocasse.

Depuis mon initiation à M. Skinner, j'ai vu le concept du renforcement partout : les parents et leurs enfants, les enseignants qui ont affaire aux enfants, le patron et ses employés, même la société et la population tenant compte de la loi et d'autres règlements qui nous gouvernent. La façon dont nous sommes gouvernés a été développée d'après le principe que lorsque nous faisons une chose, selon que la réaction suscitée est positive ou négative, nous la faisons à nouveau ou nous faisons autre chose.

L'ordinateur personnel existe depuis 1980 à peu près mais avec l'avènement d'Internet au milieu des années 90, on a vu la popularité de l'ordinateur exploser. Qui savait que le désir de se communiquer électroniquement était si répandu dans le monde ? C'est là que j'ai vu une chose curieuse.

Le courriel est devenu probablement un des moyens majeurs de communication, sinon le moyen majeur. Ceux d'entre nous pour qui le mail est l'essentiel de la, la vérification de la boîte de réception est devenue une action primordiale pour la bonne communication. Est-ce qu'il y a un courriel important auquel nous devons répondre ? Sinon, revérifions la boîte de réception dans une minute. Nous y retournons constamment pour voir s'il y a un nouveau mail. .... Hé ! Quelle est la différence entre la boîte de réception et la boîte de Skinner ?

Soit au bureau, soit chez moi, j'ai constaté que je retournais à ma boîte de réception maintes et maintes fois dans l'espoir de trouver un nouveau courriel. Tout à coup, il m'est venu à l'esprit qu'il y avait un fort lien entre ce phénomène et le renforcement intermittent. Néanmoins, cette fois il ne s'agissait pas d'un morceau de nourriture, non, la chose voulue, la récompense était un courriel. Ma boîte de réception était une machine à sous !

J'ai bien gloussé longtemps quand je me suis vu comme un pigeon dans une boîte de Skinner. Je me suis rendu compte qu'à mon insu l'action de vérifier mon courriel était devenue une habitude et cette habitude contrôlait ma vie dans une certaine mesure. J'ai commencé à regarder mes collègues au bureau et j'ai remarqué que beaucoup d'entre eux faisaient la même chose que moi. Ils étaient aussi captivés par le courriel. Ou devrais-je dire qu'ils étaient aussi captivé par la possibilité ou l'espérance de recevoir un courriel.

Je me suis décidé à me reprendre en main et à changer un peu ma vie. Chez moi, oui, je pouvais voir s'il y avait du courriel de temps en temps mais cela ne voulait pas dire que je devais surveiller ma boîte de réception sans cesse. Et le résultat ? Je pense que je ne suis plus esclave de mon ordi. Au lieu de gaspiller mon temps à regarder à maintes reprises ma boîte de réception, je peux faire d'autres choses et je peux me contenter de regarder mon courriel ... non, je peux me limiter à regarder mon courriel seulement à certains moments pendant la journée. Maintenant je vois très clairement qu'en réalité, il n'y a pas beaucoup de courriels qui méritent une réponse immédiate. Comme je dis toujours à mes collègues, en cas d'urgence, on peut me téléphoner. Non, on devrait me téléphoner ! Hé, s'il y a une situation critique, on ne devrait pas envoyer de courriel, on devrait contacter un être humain par téléphone pour être certain que quelqu'un soit mis au courant !

Tout le monde a-t-il eu la même révélation ? L'arrivée d'un appareil portatif sur le marché et son accueil favorable dans le domaine des affaires tend à prouver le contraire. Si je regarde l'emploi de ces appareils Blackberry, je pense que non. En fait le phénomène se répand et empire. Compte tenu de la portabilité de l'appareil, on peut être connecté à son courriel vingt-quatre heures sur vingt-quatre n'importe où. Si je regarde autour de moi, je peux dire que la situation est maintenant devenue tout à fait marrante.


Un des cadres de la compagnie pour laquelle je travaille, que je vais nommer Will pour cet essai, est fana du Blackberry depuis plusieurs années. Il a même dépensé son propre argent pour en acheter un. Enfin, il a convaincu la direction de la compagnie d'investir dans la technologie Blackberry et d'équiper certains employés de cet appareil portable, un téléphone intelligent. Maintenant, l'emploi de ces appareils est courant chez nos employés. Moi-même, j'en ai un mais je dois avouer que l'appareil passe la plupart du temps dans un tiroir de mon bureau. Cependant, qu'est-ce que j'ai observé chez les autres?

Au cours des réunions quand tout le monde devrait faire attention au conférencier, je peux constater qu'un certain nombre de personnes jettent un coup d'œil sous la table devant eux. Elles gardent leur Blackberry sur le giron pour pouvoir regarder l'écran à la dérobée. Parfois je peux même remarquer que telle ou telle personne a même arrêté de regarder le conférencier et toute l'attention de la personne se focalise sur son giron, sur son Blackberry afin qu'elle tape une réponse à un mail.

Mon collègue Will occupe le bureau à côté du mien. Une fois je l'ai vu sortir de son bureau et aller dans la direction des toilettes. Une minute plus tard, j'ai moi-même décidé d'aller aux toilettes. En arrivant dans le couloir, j'ai vu Will juste devant la porte des toilettes en train de regarder son Blackberry. Je savais qu'il avait un ordinateur dans son bureau où il pouvait consulter son courriel et je me demandais donc ce qui avait bien pu arriver de si important durant ce court laps de temps qu'il mettait pour traverser les 25 mètres qui séparaient son bureau des toilettes pour hommes ? Pourquoi était-il nécessaire de vérifier son courriel avant d'entrer dans les toilettes ?

En parlant des toilettes, je me souviens qu'une fois, alors que j'étais moi-même aux toilettes, je me lavais les mains quand j'ai entendu le bruit distinctif du mode vibreur d'un Blackberry. Sous la paroi d'une des cabines de toilettes, je pouvais voir les deux pieds d'un homme, les chaussures de Will ! Mince alors, il répondait à son email ! Quel ambidextre !

Je vois maintenant ce Blackberry et d'autres appareils semblables partout. Comme mon expérience dans les toilettes le montre, l'aspect ubiquitaire de cet appareil peut être très amusant. Son omniprésence montre le besoin de communiquer, le besoin d'être connecté au « réseau de l'humanité » pour toutes les personnes qui en possèdent un. Ce prétendu besoin d'être au courant m'amène à l'observation que pour ces gens, l'éventuelle prochaine communication va nécessairement être plus intéressante que celle que l'on a en ce moment.

Avez-vous déjà connu la situation où vous êtes dans le bureau de quelqu'un d'autre, vous êtes en train de parler avec la personne en question et tout à coup, le téléphone sonne. La personne vous dit, « Pardon » et puis, répond au téléphone. Un instant ... il y a un être humain devant vous, une personne vivante avec qui vous parlez, pourtant le téléphone a la priorité ? Connaît-on le concept de la relation client ? Où est la bienséance du bureau ?

Il s'agit du même phénomène pour ce qui est des téléphones intelligents toutefois, nous parlons maintenant de deux choses : les appels téléphoniques et les courriels. Oui, même les messages électroniques. Le Blackberry comme cellulaire sonnera si l'on reçoit un appel, mais il sonnera aussi si un courriel est reçu. Je sais que la sonnerie est la plupart du temps différente de celle qui indique un appel, cependant on peut voir le même phénomène : la personne contactée donne plus de priorité à l'arrivée de ce que la sonnerie indique qu'à la personne avec qui elle parle. À mes yeux, c'est un exemple parfait du conditionnement opérant de M. Skinner : nous sommes les pigeons de Skinner.


Tout bien considéré, je dois ajouter une autre observation de ces « pigeons de Skinner », une observation que j'ai notée dans des journaux. Il y a de bonnes raisons de mettre en avant l'argument selon lequel la société actuelle à l'ère de communication instantanée n'est plus capable que de courtes durées d'attention et le besoin d'être toujours en communication n'est qu'une indication de la rapidité avec laquelle on s'ennuie et de la façon dont on cherche constamment un nouveau stimulus pour satisfaire le besoin de se divertir.

2009-12-07

La Mort de mon père

Mon père est mort le 13 janvier, 2004 à 16h45 à peu près. J'étais là au moment du dernier battement de son cœur, à côté de son lit dans l'unité de soins intensifs à l'hôpital. Le moniteur cardiaque a signalé une baisse du pouls; une infirmière est arrivée pour vérifier l'appareil et m'a dit que c'était la fin. Nous avons regardé le nombre de pulsations diminuer pendant les trois minutes finales jusqu'à ce que le tracé ne soit plus qu'une ligne plate.

Pendant ces trois dernières minutes, je me souviens avoir éprouvé une grande panique. Mon père était en train de mourir juste devant moi et c'était vraiment le dernier moment de mon vivant où je pouvais parler avec lui. Il était encore en vie mais en un instant, il serait mort. À la réflexion, même si je lui parlais, je suis certain qu'il ne pouvait pas m'entendre. Je ne sais même pas s'il était conscient. Le cœur faiblissait, le sang devait certainement moins bien circuler, son cerveau avait-il même assez d'oxygène pour fonctionner ? J'en doute.

Quand j'ai vu le tracé du moniteur cardiaque indiquer qu'il n'y avait plus de battements de cœur, je me rappelle que j'ai pensé « Mince, c'est fini ! » J'en étais ahuri, stupéfait. Après avoir passé toute ma vie en compagnie de mon père, de cet homme, j'étais maintenant obligé de continuer sans lui. Il n'existait plus. Devant moi, bien sûr, il y avait le corps de mon père, mais ce n'était qu'un corps, ce n'était plus mon père.

J'avais une forte impression de déjà-vu. Quand j'étais enfant, toute la famille passait chaque été deux ou trois semaines dans un chalet de plage. À la fin de nos vacances, nous faisions nos bagages, nous montions en voiture et nous repartions chez nous. Je regardais le chalet à travers la lunette arrière. Il devenait de plus en plus petit au fur et à mesure que la voiture s'en éloignait, jusqu'à disparaître complètement. J'avais un fort sentiment de nostalgie; je ne voulais pas quitter le chalet néanmoins je devais le faire parce qu'il m'était nécessaire d'aller ailleurs. Toutes les bonnes choses ont une fin.

C'était ce même sentiment de nostalgie que j éprouvais assis au chevet de mon père. Toutefois je ne m'éloignais pas d'une manière physique, il n'y avait pas de déplacement en voiture, je m'éloignais de mon père dans le temps. Sa vie s'était arrêtée, mais la mienne continuait. Avec chaque minute après sa mort, la distance, le temps entre nous « s'agrandissait ». Comme j'avais regardé à travers la lunette arrière le chalet disparaître dans la distance, je regardais mon père disparaître dans le passé.

Au cours des années, j'ai entendu parler du concept de la vie après la mort. Est-il vrai ou non ? Mon père est-il encore vivant quelque part, était-il encore vivant au moment où j'étais assis à côté de son corps ? Je ne sais pas. Cependant, il m'était venu à l'esprit que dans un certain sens, oui, il était encore en vie dans mes souvenirs. Le corporel était parti, mais l'image, sa mémoire existait toujours. Dans ce sens, si je pouvais garder le souvenir de mon père, il continuerait à vivre. Mais on sait très bien qu'avec le temps, un souvenir devient flou et parfois s'efface.

L'infirmière a quitté la chambre d'hôpital et je me suis retrouvé seul. J'ai remarqué que les yeux de mon père étaient encore à moitié ouverts. J'avais vu plusieurs fois dans des films quelqu'un fermer les yeux d'un défunt en glissant la main sur les paupières. En regardant ces scènes, j'avais l'impression que c'était assez facile de le faire. J'ai essayé de faire la même chose et ça n'a pas marché. J'ai deviné que les muscles étaient devenus un peu raides après la mort et peut-être ce que j'avais vu dans les films, n'était pas tout à fait vrai. J'ai essayé à nouveau en appliquant un peu plus de pression sur les paupières toutefois je ne suis pas arrivé à fermer les yeux. Quoi faire d'autre ? C'était curieux de toucher le corps de mon père. Une fois que quelqu'un est mort, nous semblons ne plus vouloir le toucher. La mort est une chose à éviter.

Un de mes amis d'adolescence est devenu policier au sein de la Gendarmerie royale du Canada. Il m'a raconté comment un jour, il a répondu à un appel d'urgence qui impliquait un accident routier. C'était un dimanche matin, il devait être 9h ou 10h. En arrivant sur les lieux, il a découvert un homme au bord de la route qui avait été éjecté de sa voiture. Mon ami s'est précipité auprès de l'accidenté pour le secourir. Mon ami avait la tête de l'accidenté sur son giron quand l'homme a poussé un soupir et est mort, sa tête encore sur les genoux de mon ami. Mon ami m'a décrit comment la situation lui avait semblé insolite. Cet homme venait de mourir et cependant la vie continuait. Il y avait du soleil. Au-dessus de sa tête, mon ami pouvait entendre le pépiement des oiseaux. À part les deux voitures impliquées dans cet accident, c'était une matinée agréable.

Au chevet de mon père, je pensais à cette histoire. Je ressentais cette tristesse que l'on ressent quand on perd quelqu'un tout en reconnaissant que la vie continue. La chambre d'hôpital était silencieuse. Je pouvais entendre des voix dans le couloir mais je ne pouvais pas comprendre ce qu'on disait. À un moment, j'ai entendu rire des infirmières et j'ai compris qu'ailleurs, pour ces autres, c'était une autre journée au boulot, un autre poste de huit heures où on s'occupait des patients, des vivants et même des morts. Malgré la fin d'une vie, nous autres continuons à mener nos propres vies.


2009-12-05

jeudi 26 novembre 2009

Hyères 2009

Du 25 septembre au 17 octobre 2009, trois semaines au total, Elise et moi avons suivi un cours d'immersion à Hyères, France. Nous avions décidé de faire d'une pierre deux coups en essayant de mélanger des vacances et de l'apprentissage, c'est-à-dire, passer du temps en France, dans un pays que nous aimons beaucoup, et apprendre un peu le français, une langue que nous aimerions mieux parler.

Pourquoi Hyères ? Avant de faire quoi que ce soit, ma femme et moi avions fait des recherches sur Internet pour découvrir l'état de choses : quelles écoles existent, quel est le prix d'un cours, quelle sorte d'hébergement est disponible, si telle ou telle école suit le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) ? En plus, puisque nous voulions y aller en automne pour éviter la chaleur d'été, nous voulions un endroit assez agréable pendant cette saison.

En fin de compte, nous avons choisi l'Institut d'Enseignement de la Langue Française sur la Côte d'Azur, autrement appelé par l'acronyme ELFCA. Notre raison pour ce choix était tout simplement une question de coût : les autres écoles étaient chères en comparaison de celle-là. Cependant, après nous être décidés à sélectionner cette école ELFCA, nous avons appris qu'elle offrait un rabais hors saison et en plus, un rabais spécial de 50 % sur un deuxième étudiant. Nous avons encore de la difficulté à croire que nous avons versé aussi peu pour un séjour de trois semaines. La première école que nous avions trouvée, hautement recommandée, voulait nous prendre deux fois et demie de plus !

Je donne un résumé de notre réservation à l'école :
  • trois semaines au total
  • des cours de 8h30 à 12h30, du lundi au vendredi
  • l'après-midi : un séminaire sur divers sujets au moins deux fois par semaine
  • l'après-midi : accès libre au laboratoire de langues
  • hébergement : une grande chambre avec salle de bains attenante
  • 2 repas, 7 jours par semaine : petit déjeuner et dîner
  • notre hôtesse faisait notre lessive
Au total, nous avons payé à peu près trois mille six cent dollars canadiens. Si j'ajoute le prix de nos billets d'avion, nos déjeuners, l'argent de poche, quelques dépenses supplémentaires, la location d'une voiture pour un week-end et une nuit dans un hôtel, des cadeaux pour notre famille, je peux dire que notre voyage d'études ou« notre formation de plaisance » n'a pas coûté très cher, moins de sept mille dollars canadiens au total. Pour mieux comprendre si c'est cher ou non, je peux comparer notre voyage avec un autre. Je viens d'entendre que ma fille et son petit ami ont fait des réservations pour un lieu de vacances à Cuba : une semaine pour deux personnes tout compris pour la somme totale de deux mille dollars canadiens.

Jusqu'ici je parle de la« quantité » de notre voyage, le coût du voyage, ce que l'école nous a offert, maintenant je veux parler de la qualité de notre voyage, du pour et du contre. En général, l'école ELFCA était un bon établissement d'enseignement. Le bâtiment remontait au début des années 90 mais les lieux étaient en assez bon état. Le personnel était gentil, les professeurs étaient enthousiastes. Le laboratoire de langues avait un recueil d'exercices enregistrés sur bande par une des propriétaires de l'école, un recueil que j'ai trouvé compréhensif, intéressant et éducatif. La cafétéria de l'école offrait des déjeuners bon marché et nous y mangions tous les jours.

Les cours donnés comprenaient des exercices de grammaire, d'écoute, des dictées et surtout de la conversation. Tous les professeurs, toutes des femmes, étaient aimables, enthousiastes, sympathiques. Quand même une chose curieuse, une que j'ai retrouvée dans tous les cours que j'ai jamais suivis, était que je passais la plupart de mon temps dans ces cours à écouter les autres étudiants, c'est-à-dire des personnes essayant d'apprendre la langue. J'ai trouvé cette constatation un peu amusante. Les autres étudiants et moi nous aurions dû écouter des locuteurs natifs pour mieux apprendre la prononciation, le vocabulaire, la syntaxe, etc., cependant nous étions tous en train de nous écouter les uns les autres y compris nos balbutiements, nos fautes, nos propres accents. Après réflexion je ne pense pas qu'on puisse éviter ce phénomène. C'est une caractéristique inhérente à une salle de classe remplie d'étudiants : nous sommes tous dans le même bain.

Ma femme était à un niveau intermédiaire et j'étais à un niveau avancé et par conséquent, nous n'étions pas dans la même classe. Son cours avait peut-être plus de structure tandis que ma classe insistait plus sur la conversation et était plus libre. Mes professeurs cherchaient à faire converser les étudiants en parlant des nouvelles, en posant des questions aux étudiants sur leurs expériences à Hyères et aussi en dévoilant une partie de leurs propres vies. C'est là que j'ai entendu des nouvelles intéressantes sur l'école.

Au cours de 2009, le monde a dû faire face à deux crises : la crise économique et la pandémie de la grippe A. En conséquence, il y avait une baisse dramatique du nombre de voyageurs dans le monde et l'école en souffrait elle aussi en voyant une diminution notable d'inscriptions. Plus d'un professeur m'ont fait mention d'une certaine inquiétude si l'école resterait ouverte ou non. Nous étions hors saison et je m'attendais à voir moins d'étudiants néanmoins on m'a dit que le nombre d'étudiants était habituellement supérieur. Voilà un bon exemple de l'effet domino : ces deux crises ont eu des répercussions sur cette petite école de langue située bien loin de ce que nous appelons les centres importants du monde. À ce moment-là, j'ai compris la raison pour laquelle l'école nous avait fait cette offre d'un rabais de 50 % pour un deuxième étudiant : elle cherchait à attirer de nouveaux étudiants en leur donnant une raison convaincante de voyager.

Cette question des crises et les effets y afférents m'a semblé plus important encore quand je me suis mis à regarder de près le coût de la vie en France. Je viens d'essayer de trouver des statistiques sur ce sujet, une comparaison entre la France et la Canada, mais mes recherches sur Internet ont été infructueuses. Par conséquent, je me contente ici de faire part de quelques observations faites pendant mon temps à Hyères.

L'essence était deux fois plus chère en France qu'au Canada. En achetant quelque chose, soit un café, soit un sandwich, je devais garder en tête que le prix était en euros. Probablement que le nombre d'euros que je payais pour une chose était égal au nombre de dollars que je payais au Canada pour la chose en question. À ce moment-là, un euro était égal à 1,6 dollars. Un café à trois euros me coûtait cinq dollars canadiens ! Compte tenu de ce décalage évident des prix entre la France et le Canada, me femme et moi nous demandions comment les Français se débrouillaient financièrement. Si j'ajoutais à cela la baisse de voyageurs dans l'école, je comprenais que le personnel pourrait avoir du mal à joindre les deux bouts.

L'école offrait des choix d'hébergement et nous avons choisi d'habiter avec une famille française pour profiter d'« une immersion totale » comme le site Web de l'école indiquait. Les seules conditions que nous avons ajoutées à notre demande étaient d'avoir une salle de bains attenante, d'avoir une famille sans enfants et d'avoir accès à un lave-linge. En pensant à la famille choisie, je peux dire que l'école a bien réussi à exaucer nos vœux.

Notre chambre avait une entrée privée, une salle de bains attenante et avait aussi accès à une petite cour derrière la maison où je passais assez souvent une ou deux heures l'après-midi à étudier. Cependant, l'aspect le plus important de notre famille d'accueil était les repas et le temps supplémentaire qu'ils nous accordaient pour mettre en pratique nos connaissances du français. À l'école pendant notre séjour, je comparais nos expériences avec celles d'autres étudiants et à mon avis, les étudiants qui avaient décidé de rester dans un hôtel ou de partager un logement avec un ami qui parlait probablement la même langue qu'eux, manquaient l'occasion d'interaction importante avec des locuteurs natifs. J'ai dit à ma femme que j'avais l'impression que chaque repas était un mini-cours, une leçon particulière que nous n'avions pas payée. J'ajoute ici que notre famille était très gentille, aimable et bavarde. Assez souvent nous passions deux heures à table à causer de tout et n'importe quoi.

Un autre service de l'école dont nous avons profité était l'achat de deux bicyclettes. Oui, j'ai bien dit l'achat et pas la location. D'abord, j'ai trouvé cet arrangement un peu bizarre mais à la réflexion, j'ai compris les avantages pour les parties prenantes. L'école vend une bicyclette à un étudiant. À la fin de la semaine, l'étudiant revend le vélo à l'école. Entre-temps, la bicyclette est la propriété de l'étudiant, pas celle de l'école. Les implications légales pour l'école sont que l'école n'est pas obligée de souscrire à une assurance pour l'étudiant. Si l'étudiant se blesse, c'est la faute de l'étudiant. Si la bicyclette est volée, c'est l'étudiant qui perd de l'argent. Si l'étudiant a un accident, c'est l'étudiant qui est responsable, pas l'école.

Ma femme et moi avons acheté deux vélos et ne les avons gardés qu'une semaine. Le seul ennui dans cette affaire était que nous devions payer l'école comptant. Cela voulait dire qu'il nous fallait apporter assez d'argent pour acheter deux vélos à 115 euros chacun. Ensuite, l'école nous a rendu cent euros pour chaque bicyclette; le coût d'une bicyclette n'était que de quinze euros par semaine. Avoir assez d'argent en espèces n'était pas grand chose, mais c'était une chose supplémentaire à ajouter à notre budget.

Tout bien considéré, nous avons trouvé notre voyage en France très intéressant, très agréable. En ce moment nous ne savons pas quand nous allons y retourner, mais nous avons bien l'intention d'y retourner un jour.

2009-11-26

Personne disparue

Je lis un titre en gros dans un journal qui indique qu'une personne est portée disparue. L'article donne des détails sur la personne en question en expliquant que sa famille n'a pas la moindre idée de ce qui s'est passé. La police n'a trouvé aucune trace de cette personne disparue et maintenant la famille et la police veulent s'assurer de la collaboration du public en distribuant aux médias des photos et des informations sur cette personne disparue. Où est cette personne ? Il semble qu'elle ait disparu de la face de la terre. Comment se peut-il qu'une chose pareille arrive ?

En vacances aux États-Unis, j'achète un carton de lait. Sur le carton figure la photo d'une petite fille avec sa description et les circonstances de sa disparition. Selon le texte, ses parents ne l'ont pas vue depuis deux ans. Où est-elle ? Qu'est-ce qui lui est arrivé ? Comment est-il possible que cette fille disparaisse sans laisser de trace ?

Je viens de faire des recherches préliminaires sur Internet et je vois que ce phénomène existe partout dans le monde. Il est curieux de noter que d'après les experts, la grande majorité des personnes disparaît à dessein. Des difficultés financières, un mauvais mariage, un crime commis, il y a pléthore de raisons qui peuvent expliquer pourquoi une personne prendrait la décision de partir sans en prévenir personne. Pour les proches qui restent, d'après les journaux, il y a l'immense douleur de la famille délaissée, obligée de demeurer dans l'incertitude, tracassée par le sort de leur être cher. C'est le besoin important de découvrir la vérité qui éclaircit la disparition de la personne en question.

De même, pour nous le public, il y a le besoin important de résoudre l'énigme d'une histoire irrésolue, sans dénouement. Selon mes recherches, il y a pas mal de ces histoires qui n'ont jamais de conclusion, qui restent à jamais non résolue.




En Amérique du Nord, le nom de Jimmy Hoffa est synonyme de ce mystère d'un disparu jamais retrouvé. En tant que chef d'un syndicat américain, Hoffa est devenu très connu pendant les années 60. Il a participé à certaines activités illégales, a eu des liens avec la Mafia et a même passé du temps en prison. En 1975, il disparaît et son corps n'est jamais été retrouvé. Depuis cet événement, la simple évocation de son nom rappelle l'idée d'un disparu, au moins au Canada et aux États-Unis où l'histoire est assez bien connue. Dans des situations plutôt comiques à la télé on y fait référence : le protagoniste ouvre quelque chose, un placard, une malle ou autre chose et quelqu'un d'autre lui demande « Qu'est-ce que tu as trouvé ? Jimmy Hoffa ? »





Une autre histoire d'un disparu jamais retrouvé est Amelia Earhart. Cette aviatrice américaine essayait de faire le tour du monde en avion quand elle disparut en mer le 2 juillet 1937 dans l'océan Pacifique. Malgré quatre mois de recherches par une dizaine de navires et une cinquantaine d'avions dépêchés par le gouvernement américain, aucune trace de l'appareil n'a jamais été détectée. Jusqu'ici, personne n'a élucidé le sort de Mme Earhart.

D'autres histoires, en fin de compte élucidées, montrent à quel point il est difficile d'éclaircir ce genre de mystère. Le monde est petit selon le dicton mais il est également grand et c'est dans cette grandeur qu'une personne peut se perdre ou être cachée par quelqu'un d'autre.




En 1991, une jeune fille américaine de onze ans, Jaycee Lee Dugard fut kidnappée. Elle fut retrouvée 18 ans plus tard, en 2009. Pendant tout ce temps, elle était séquestrée par un couple, maintenue captive dans un cabanon de jardin où elle a eu deux filles avec son ravisseur, un délinquant sexuel connu des services de police. Le kidnappeur est maintenant derrière les barreaux pourtant on se pose la question de savoir comment le kidnappeur a réussi à cacher son rapt si longtemps.




En 2007, l'aventurier américain Steve Fossett disparut pendant un vol qu'il effectuait seul dans l'état de Nevada aux États-Unis. Après un mois de recherches intensives, les autorités ont cessé l'enquête. Un an plus tard, par hasard, un randonneur trouva trois documents ayant appartenu à M. Fossett. Quelques jours plus tard, la police a trouvé l'épave de l'avion et par la suite, elle a confirmé, selon les tests ADN, que les ossements retrouvés près de l'épave étaient ceux de Steve Fossett.

Deux cas où on n'a jamais retrouvé les disparus, deux cas où on a retrouvé les disparus, un encore vivant. Cependant, la totalité des disparus dans le monde pourrait être stupéfiante si on ne considérait le petit nombre de cas énuméré ci-dessus que comme la partie visible de l'iceberg. Un article que j'avais trouvé sur Internet indique qu'il y a chaque année un million de disparus aux États-Unis, 275.000 en Angleterre et 35.000 en Australie. Si ces chiffres sont vrais, c'est incroyable.

Bien qu'ayant essayé, je n'ai pas pu trouver des chiffres définitifs pour le monde entier, cependant des articles suggéraient que le total mondial serait des dizaines de millions, sinon une centaine de millions de personnes pourraient être portées disparues chaque année à travers la planète. C'est un nombre inconcevable qui dépasse complètement mon entendement. Sommes-nous totalement inconscients de ce phénomène qui de toute évidence n'est pas rare mais au contraire commun et quotidien ? En sommes-nous si ignorants ?

J'ai constaté parmi tous ces articles sur les disparus, surtout ceux parlant des enfants disparus, que les cas qui sont résolus finissent assez souvent par démasquer un prédateur sexuel. Je laisse les experts expliquer l'état d'esprit de ces personnes, cependant, moi, M. Untel, je trouve ce comportement si inconnu, si étrange, j'avoue être tout à fait incapable d'imaginer ce que ces personnes ont en tête pour justifier un tel crime.

Quelques articles ont détaillé des cas où le prédateur sexuel est arrivé à perpétrer une série de crimes sans être capturé. Malgré plusieurs disparus, la police ne parvenait pas à recouper les indices pour confondre le responsable de ces horreurs. Et bien sûr, quelle horreur de découvrir que la personne en question vivait ici, dans nos villes, parmi nous sans que nous sachions qu'il s'agissait d'un criminel.





Deux ou trois fois maintenant, j'ai vu une de ces émissions sur la nature à la télévision qui montre la chasse d'un troupeau de gazelles par une troupe de lions. Les naturalistes sont parvenus à filmer comment les lions se cachent dans les hautes herbes autour des gazelles qui sont en train de brouter. Patiemment, les lions attendent qu'une gazelle s'égare un peu trop du reste du troupeau et soudain un des lions sort de l'herbe, tombe sur la gazelle et l'entraîne dans l'herbe. L'exécution de ce mouvement est si rapide que les autres gazelles ne sont pas conscientes de ce qui vient de se passer aux bords du troupeau. Même s'il y a un peu de bruit, quand des gazelles se lèvent la tête pour voir d'où vient le bruit, il n'y a rien à voir.

En regardant cette scène, j'ai fait un lien entre le troupeau de gazelles et notre société. Une ou deux gazelles pourraient remarquer l'absence d'une de leurs semblables sans s'en inquiéter. « Où est Fred ? - Je ne sais pas. Il était ici il y a juste un moment. » De la même manière, une ou deux personnes de notre société pourraient remarquer l'absence de quelqu'un allant même jusqu'à appeler la police. Toutefois, au niveau du troupeau, au niveau de la société, la plupart des gens continuent à mener leurs vies. Nous ne sommes pas touchés directement par la perte d'une personne.

Dans cette métaphore, les lions représentent évidemment ces prédateurs dans notre société. En sommes-nous conscient ? Sommes-nous prêts à faire quelque chose ?

À une échelle mondiale, on peut mettre en avant des guerres, la traite des blanches, la traite des noirs, l'esclavage en général, le trafic de drogue, les prédateurs sexuels; la liste est sans fin, mais nous revenons sur le fait qu'en général, nous, la société, nous qualifions le nombre de disparus d'acceptable. Pourquoi acceptable ? Parce que pour la plupart nous ne réagissons pas, sauf dans les cas où nous sommes touchés personnellement.

Je pense à la Une de mon journal, à mon carton de lait. Où sont ces personnes, ces disparus ? Qui sont-ils ? Qu'est-ce qui leur est arrivé ? Est-ce que je le saurai un jour ? Probablement pas.

2009-11-25

vendredi 20 novembre 2009

Sous mon nez


Sous mon nez ... au-dessus de ma tête ... Puis-je toujours voir ce qui est juste devant moi ?

Une fois, il y a des années, j'ai amené nos deux petits chiens, les Shih Tzu au parc pour une de nos promenades journalières. À l'entrée du parc, on avait érigé une petite barrière pour empêcher l'entrée des bicyclettes, des motocyclettes et d'autres véhicules motorisés. Cette barrière comprenait deux arcs espacés l'un de l'autre et il y avait assez d'espace pour marcher entre les arcs mais pas assez d'espace pour faire passer un véhicule. Chaque fois que nous arrivions à la barrière, les deux chiens marchaient en dessous des arcs tandis que je devais marcher entre les deux arcs. Puisque je tenais les laisses à la main, j'étais obligé de passer les laisses en dessous de la barrière d'une main à l'autre.

Il m'est venu à l'esprit que pour les chiens, la barrière n'existait pas. Ils étaient si petits qu'ils étaient capables de marcher en dessous de la barrière. La barrière ne servait à rien, elle ne les empêchait pas d'avoir accès au parc. Évidemment, pour moi, la barrière était complètement réelle et je devais la contourner pour accéder au parc.

En cogitant sur les chiens et la barrière, je me suis posé la question de savoir s'il y a des choses que je ne vois pas. C'est un peu curieux de se poser une telle question parce qu'on arrive à un paradoxe où l'on se demande comment on peut voir ce qu'on ne peut pas voir. Peut-être qu'il n'est pas question de ne pas être capable de voir ces choses, mais tout comme les chiens, le problème serait que je ne regarde pas en haut, au-dessus de ma tête. Ou, comme les chiens, si je regarde en haut, peut-être que je ne comprends pas ce que je vois.

Remarquons les trois cas ci-dessous :
  • Numéro un : Je suis incapable de voir quelque chose. Cette chose est trop loin, elle est invisible, peut-être est-elle trop grande ou trop petite. Je peux dire que cette incapacité de voir est une limitation physique, une limitation que je surmonte en utilisant quelque chose qui m'aide à mieux voir, par exemple un télescope ou un microscope.
  • Numéro deux : Je suis si préoccupé par ma propre vie, je ne prends jamais le temps de regarder telle ou telle chose. Je suis obligé de gagner ma vie, j'ai des enfants, je m'occupe du foyer, il y a le train-train de la vie quotidienne qui capte mon attention et je n'ai pas le temps de m'arrêter pour regarder quelque chose ou je suis tout simplement trop fatigué pour le faire.
  • Numéro trois : Même si je regarde quelque chose, je ne comprends pas ce que je vois. La barrière est tout à fait incompréhensible pour mes deux chiens et je peux mettre en avant la petite taille de leurs cerveaux. Pourtant je pense que nous pouvons dire que la même idée est applicable à nous tous, y compris à nos cerveaux ! Par exemple, nous avons découvert le feu. Nous avons créé la roue. Nous savons maintenant que la Terre tourne autour du Soleil. En ce moment, toutes ces choses semblent toutes naturelles, néanmoins, à tel ou tel moment, nous n'avions pas de feu, ni de roue et nous pensions que le Soleil tournait autour de la Terre.

En résumé, je peux ne pas faire attention à telle ou telle chose en raison d'une limitation physique, d'un manque de temps ou d'une inaptitude à comprendre.

Limitation physique
Je pense que le cas d'une limitation physique est assez facile à comprendre. Je prends un microscope et je vois ce que je ne voyais pas, je vois le trop petit. Je prends des jumelles et je vois ce que je voyais mal ou pas du tout, je vois ce qui est trop loin. Je prends un télescope et je vois ce qui est bien sûr hors de mon champ visuel.

Je peux même élargir ce concept pour inclure un appareil photographique. Je prends une photo et je préserve ce que je vois, ce qui me permet d'étudier la scène afin de relever éventuellement des détails que je n'aurais pas vus la première fois.

La caméra me donne la possibilité de capter le mouvement de la vie elle-même. Remarquez que je ne parle pas des fictions, je parle juste du processus de capter le mouvement. De la même façon que je peux étudier les détails d'une photo, je peux étudier les détails du mouvement pour voir ce qui m'aurait échappé la première fois.

La caméra me fait penser aussi aux techniques de l'accéléré et du ralenti, même à celle de la marche arrière qui me permettent de voir un aspect du mouvement qui pourrait être hors de ma faculté de perception. Il y a des choses qui se déroulent trop vite ou trop lentement pour que je puisse les apercevoir : un oiseau-mouche qui bat des ailes jusqu'à 80 fois par seconde, une balle qui traverse une pomme à une vitesse de trois mille kilomètres à l'heure, un bourgeon qui s'ouvre pendant une heure ou la construction d'un édifice qui se déroule pendant des mois, voire des années. Bien que je puisse voir toutes ces choses, la lenteur ou la vitesse de l'action rend le phénomène presque imperceptible et la caméra me le laisse voir.

Pour conclure, je peux dire que nous, les êtres humains, souffrons d'une certaine limitation physique. Toutefois, nous parvenons à améliorer nos facultés sensorielles en employant des outils technologiques qui nous permettent de « connaître » ce qui est hors de la portée de nos sens.

Manque de temps
Le cas d'un manque de temps est assurément une caractéristique de la vie moderne et son caractère pressé. Je me dépêche tellement, je ne m'arrête jamais pour regarder quelque chose de nouveau. J'éprouve tellement le besoin constant de compléter telle ou telle tâche que j'oublie de mettre de côté assez de temps pour réfléchir sur comment compléter cette tâche.

Une fois que j'allais quelque part en voiture, j'ai roulé sur un morceau de béton dans la rue. Le morceau était si grand qu'il a crevé le pneu. J'ai eu juste assez de temps de trouver un parking devant un magasin avant que le pneu ne soit tout à fait dégonflé. À cette époque, j'étais membre de l'Association canadienne des automobilistes et de ce fait, j'avais la possibilité de téléphoner à l'un des centres de service de l'ACA pour demander de l'aide. Par exemple, je pouvais me faire remorquer à un garage de mon choix. Malheureusement, l'heure à laquelle j'ai téléphoné était « l'heure de pointe » du service routier d'urgence et j'ai découvert que je devais attendre au moins une heure, peut-être une heure et demie avant qu'une dépanneuse n'arrive pour m'aider. Alors j'ai pensé aller dans un restaurant pour prendre un café et lire un journal cependant l'idée d'attendre aussi longtemps qu'une heure et demie m'ennuyait.

J'ai donc décidé d'essayer de changer le pneu moi-même. Je ne l'avais pas fait depuis vingt ans mais j'avais hâte de continuer ma route. J'ai sorti le cric, d'un genre que je n'avais jamais vu, j'ai lu un manuel et en une vingtaine de minutes, je suis arrivé à monter le pneu de rechange; la première fois en presque vingt-cinq ans. J'ai téléphoné à l'ACA pour dire que je n'avais plus besoin de leurs services et je suis parti.

En raison de ma situation, j'ai été forcé de prendre le temps nécessaire pour étudier le problème et le résoudre.

L'autre jour, je rentrais assez vite après être sorti du métro. Pour telle ou telle raison, je me suis arrêté pour regarder le soleil à travers le feuillage d'un arbre. Tout à coup, je me suis rendu compte que cet arbre faisait partie d'un joli petit parc, un terrain aménagé en centre ville par la ville elle-même pour le bienfait du public. J'y suis entré par un portillon, j'ai flâné un peu, j'ai lu une plaque historique sur quelque événement d'importance dans l'histoire du Canada. En raison de mon arrêt, j'ai découvert un agrément de la vie en ville que je n'avais jamais vu auparavant.

Les deux exemples personnels que je viens de raconter sont liés à ce manque de temps que j'ai déjà fait remarquer. Qu'est-ce que je ne comprends pas, que je ne fais pas, que je ne vois pas parce que je ne prends tout simplement pas le temps pour le faire ?

Inaptitude à comprendre
Enfin, cas numéro trois, nous entamons la question des bornes de notre intelligence, la question de notre inaptitude à comprendre. Aujourd'hui, nous avons l'énergie nucléaire toutefois ça ne fait pas si longtemps que le nucléaire n'était qu'un concept, pas une réalité. Aujourd'hui, nous avons l'Internet comme forme de communication mais avant les années 90, le téléphone était roi. Maintenant, au moment présent, qu'est-ce qui nous reste à découvrir, qu'est-ce qui est ici juste devant nos yeux que nous ne comprenons pas ?

Malgré l'avancement de notre vie, c'est peu dire qu'il y a beaucoup de choses que nous ne comprenons pas et par manque de compréhension, nous ne faisons pas ces choses, nous ne les avons pas encore faites. Mon père m'a expliqué que quand il était enfant pendant les années 1930, sa famille n'avait pas de toilettes dans la maison, ni d'eau courante. Il pouvait encore se rappeler le moment où son père avait fait installer la plomberie. Pour moi la plomberie est quelque chose qui va de soi, je n'y pense jamais, mais comparativement à toute notre histoire, l'histoire de la race humaine, c'est nouveau.

Je considère un avion comme allant de soi. Je viens de prendre des vacances et ce mode de transport en faisait partie intégrale, pourtant ça ne fait pas si longtemps que mes ancêtres ne voyaient que les oiseaux voler. Je lis à la Une assez souvent des articles sur la station spatiale internationale. Si pas moi, mes enfants vont-ils avoir l'occasion de visiter l'espace, de visiter une autre planète ? Je regarde des informations sur le concept de la fusion froide et l'idée qu'elle pourrait représenter une source inépuisable d'énergie. Vais-je la voir de mon vivant ou pourrais-je voir la découverte d'une autre source d'énergie qui pourrait être par définition inépuisable ?

Mes chiens et moi
Pour mes chiens, la barrière n'existe pas. Cependant, je peux dire que la barrière existe vraiment même si les chiens ne la reconnaissent pas. Cela veut dire que la barrière a une existence indépendante de sa reconnaissance. Je reviens sur cette question métaphysique que je trouve très amusante : un arbre fait-il du bruit s'il tombe dans une forêt où il n'y a personne pour l'entendre ?

Appliquant cette idée à moi-même, j'arrive soudain à me rendre compte qu'il doit exister autour de moi des choses dont je ne suis pas du tout conscient. Mais quoi ? Voilà le paradoxe : comment puis-je voir ce que je ne peux pas voir ?

Je me rappelle une citation de Isaac Newton : « Il me semble n'avoir été qu'un enfant jouant sur la plage, tandis que le vaste océan de la vérité s'étendait inexploré devant moi. »

2009-11-18

mardi 27 octobre 2009

Gaïa

La Terre est un organisme et nous sommes tous les cellules de cet organisme.

Comment ? L'autre jour, quelqu'un m'a fait part de cette idée. D'abord, cette idée me laissa perplexe, puis lentement, à la réflexion, cette idée m'a intrigué. Si l'idée semble bizarre, est-il possible qu'elle soit vraie ? Bien sûr, il est très facile d'écarter une telle théorie en disant qu'elle est risible, qu'il n'y a pas de preuve, mais si l'on prend un moment pour y réfléchir, peut-on vraiment affirmer qu'elle est fausse ? D'où vient cette idée ?

L'idée de la Terre mère existe, semble-t-il, depuis toujours. Nos ancêtres étaient bien conscients de l'importance de la terre et savaient que tout ce qu'ils connaissaient, la vie elle-même en dépendait. Aujourd'hui notre intérêt pour le réchauffement planétaire témoigne de l'importance que nous accordons nous-mêmes à la Terre. Dans la mythologie grecque, le mot Gaïa désigne une déesse identifiée à la Terre-Mère, appelée autrement aujourd'hui la Grande Déesse ou la mère de tout être vivant.

En 1970, l'écologiste anglais John Lovelock a présenté une hypothèse selon laquelle, la Terre est une sorte de système qui comprend tous les êtres vivants de la planète et qui maintient la planète en harmonie avec la vie. L'ensemble pourrait être considéré comme un vaste organisme autorégulateur qui maintiendrait l'équilibre de ses composants en vue de favoriser la vie. M. Lovelock nomma sa théorie l'hypothèse Gaïa.

Au cours de ces dernières décennies, cette hypothèse a suscité beaucoup de controverses. Le fait que M. Lovelock employa le terme « vivant » pour parler de la Terre, suggérant que la Terre elle-même était un être vivant, y était certainement pour quelque chose. Malgré ses explications assurant que le mot vivant n'était qu'une métaphore, M. Lovelock ne pouvait empêcher d'autres gens d'interpréter ses œuvres comme établissant une vision de la Terre en tant que véritable être vivant. La déesse Gaïa est devenue la personnification des théories de Lovelock et le spiritualisme du Nouvel âge a pris parti de l'idée d'une Terre vivante : nous sommes tous une partie de la planète, nous sommes tous les cellules de cet organisme planétaire.

Vrai ou faux ? Évidemment, les théories de Lovelock ont beaucoup d'autres aspects, mais dans les termes les plus simples, même les experts ne sont pas d'accord sur la véracité ou la fausseté des idées de Lovelock. Cependant, il est facile de constater que ces idées ont capté l'attention et l'imagination de beaucoup de gens qu'ils soient scientifiques ou non.

Imaginez-vous : Chacun de nous n'est qu'une cellule d'un vaste organisme. J'ai assez souvent entendu parler de quelque chose de possible au-delà de la vie que nous connaissons : quelque chose après la mort, des extra-terrestres, le monde des esprits. Toutefois, je n'avais jamais pensé à un tel concept de super-organisme. Il semble assez amusant de poser la question de savoir si oui ou non les cellules de nos corps sont conscientes de nos corps, l'ensemble auquel elles appartiennent. Il semble aussi amusant de poser la question de savoir si oui ou non nous sommes conscients d'un organisme auquel nous appartenons ? Je pense que nous serions tous d'accord pour dire que les cellules de nos corps ne sont pas conscientes de nos propres corps. Au moins pas dans le sens que nous, les êtres humains, nous l'entendons et je pense aussi qu'il nous faut admettre que nous ne sommes pas conscients du tout de ce prétendu organisme, s'il existe.

Toute plaisanterie à part, cette idée me rappelle une histoire de science-fiction que j'ai lue il y a bien longtemps. L'auteur y suggérait que dans l'avenir, la race humaine développerait une sorte de télépathie où toute la race serait en interaction. Au lieu d'une race d'individus, nous serions une race en mesure de penser, d'agir comme un seul être, un super-être. (Hum, est-ce que je parle des « Borgs » de la série de télévision « Star Trek, the Next Generation » ?)

Malgré ces références à la science-fiction, je ne pense pas que le concept de race humaine en tant qu'entité soit encore valable. Nous avons une forme de communication, nous travaillons en groupes, nous avons des systèmes de gouvernement qui nous permettent d'agir comme un ensemble plus ou moins cohérent. D'accord, plutôt moins cohérent que plus cohérent, mais au moins il y a un peu de cohérence là-dedans quand même ! Je dois ajouter bien sûr que cette prétendue entité est à un stade de développement très primitif mais pouvons-nous en employant un peu d'imagination concevoir cet organisme dont nous serions tous les cellules ?

Je n'ai pas traité l'hypothèse de Lovelock en détail. Je laisse cela aux experts. Pourtant je trouve l'idée y afférente, cette vue de la race humaine comme un organisme intrigante. Comme je l'ai déjà indiqué, Lovelock s'est démarqué de l'idée de la Terre comme entité consciente et a prétendu que son emploi du mot « vivant » n'était qu'une métaphore pour une biomasse qui essaie de maintenir un certain équilibre hospitalier à la vie. Si je considère le terme organisme comme une métaphore pour la totalité des êtres humains qui vivent, qui travaillent, qui coexistent ensemble, je pourrais mettre en avant que le tout est plus grand que la somme des parties et qu'il y a au moins quelque chose, soit un concept, soit un véritable organisme, qui englobe l'humanité et qui représente l'entité synergique appelée la race humaine.

This is it


Michael Jackson, le roi de la pop, préparait une série de spectacles qu'il avait l'intention de donner à travers le monde quand il était mort à l'âge de 50 ans. Il avait nommé cette tournée, la première pour lui depuis les années 90, « This is it », en référence à l'expression anglaise qui évoque l'idée d'un moment attendu depuis longtemps. Qui aurait pu dire en regardant sur Internet des clips des préparatifs de la star, qu'il s'agissait du chant du cygne ? Le décès de cette vedette était inattendu, triste, une fin tragique au moment où la star allait faire son come-back.

La morale de cette histoire ? Le moment attendu depuis longtemps de l'expression « this is it » est tout simplement maintenant, le moment présent. Il n'y a pas de minute à perdre. Nous avons tous une vie, une seule vie, il n'y en a pas d'autre. Il n'y a pas d'autre chance. C'est maintenant ou jamais.

À l'âge de 57 ans, je peux dire que ma vision du monde, de la vie est un tantinet différente de celle d'une personne de 20 ans ou 30 ans. Je me dis depuis peu que si je ne suis pas mort ... pas encore! ... je suis bel et bien entre deux âges et qu'il est bien évident maintenant que je suis plus près du second que du premier. Être plus près du second âge me fait regarder le monde sous un angle différent, celui qui me fait penser que le moment attendu est le moment présent.

Quand j'avais 20 ans - hé oui, je peux encore m'en rappeler - j'étais comme n'importe quel autre jeune : je me considérais éternel. Après avoir passé des années à penser à une hypothèque, à mon travail, à ma pension et ma retraite, j'ai développé une attitude focalisée davantage sur demain et non sur l'instant présent. Oui, j'ai fait des choses, oui, j'ai vécu ma vie, mais je gardais toujours un œil sur mes responsabilités, sur mon avenir.

Il est curieux de constater qu'à l'âge de vingt ans, les jeunes ne prennent pas le temps de réfléchir à la mort. Ha ! Je suis certain que l'idée ne leur vient jamais à l'esprit. Ma femme était enseignante et elle m'a toujours parlé des ados en citant les trois I : immortel, immunisé, infertile. Comme cette liste cocasse vous le laisse deviner, les ados ont une forte tendance à ne pas penser aux dangers de la vie. Immortel : on ne va jamais avoir d'accident. Immunisé : on ne va jamais attraper une IST et bien sûr on ne penserait à se protéger d'une chose aussi dangereuse que le SIDA. Infertile ou infécond : on ne risque pas d'avoir des enfants.

Ah, tout est bien qui finit bien. Un style de vie simple : « Il vaut mieux ne pas savoir », « Heureux les ignorants ». Je pense que je pointe du doigt la raison pour laquelle on dit que la guerre est pour les jeunes. Avec l'âge, on a plus tendance à protéger ce qu'on a et à éviter le conflit, à éviter ce qui pourrait tout ficher par terre.

Ma femme et moi avons parlé de ces idées et nous avons conclu qu'il nous faut profiter du moment présent. Nous ne devrions pas attendre, nous devrions faire ce que nous voulons, ce que nous pouvons, maintenant. Qui sait ? Demain pourrait ne jamais arriver !

Il ne faut pas remettre à demain ce qu'on peut faire le jour même. Pas de seconde à perdre. J'ai déjà entendu des conseils qui suggéraient que l'on devait vivre autant que possible quand on peut parce que les risques augmentent avec l'âge et certains problèmes de santé pourraient nous empêcher de faire certaines choses.

Je viens d'écrire ce que je viens d'écrire et en me relisant, je trouve mes idées bizarres. Est-ce que je parle de moi ? C'est presque comme si je parlais de quelqu'un qui a un pied dans la tombe !

Tout ça pourrait être amusant pourtant je lis aujourd'hui que l'acteur américain Patrick Swayze est mort à l'âge de 57 ans ... Ah, puis-je faire remarquer une curieuse coïncidence ? J'ai 57 ans. Hum, peut-être que cela explique pourquoi cette idée m'est passée par la tête. J'ai devant moi un tableau de statistiques sur les morts aux États-Unis. Ces statistiques sont divisées en tranches d'âge. Le groupe entre 15 ans et 24 ans représente 1,3 % de toutes les morts tandis que le groupe des 55-64 ans en représente 10 % et celui de 65-74 ans en représente 18,4 %. On peut facilement comprendre pourquoi un ado ne pense pas à la mort. Statistiquement parlant, on a plus de chance de mourir à 57 ans qu'à 20 ans ! La mort est fortement liée à l'âge.

Ce que je viens d'annoncer, ce n'est pas nouveau. Mais laissez-moi revenir à mes moutons âgés et la raison de toute cette lapalissade verbeuse.

Au lieu de chercher une occasion plus propice, au lieu d'attendre la retraite, au lieu d'économiser, nous avons décidé de tirer avantage du moment présent pour faire ce que nous voulons faire, ce que nous pouvons faire. Demain, nous pourrions être dans un fauteuil roulant mais aujourd'hui, nous pouvons faire 5 ou 6 kilomètres de jogging d'affilée. Voilà, maintenant il nous faut profiter de ce que nous avons, y compris la santé. Après tout, Michael et Patrick ne vont jamais plus en profiter.

mardi 15 septembre 2009

Comment choisir un film

L'autre jour, un homme que je connais, Patrice, m'a expliqué pour la deuxième fois qu'il avait vu un film le week-end passé. Cette fois, « Ghost of Girlfriends Past ». Cependant, ce qui est intrigant dans cette histoire, c'est comment il a choisi le film à voir.

Apparemment, quand il a du temps de libre, il aime aller, sans organiser ou planifier en avance, au cinéma. Une fois là-bas, il regarde la liste de films et il en choisit un selon l'horaire de la prochaine séance. S'il arrive disons à six heures du soir et la prochaine séance commence à six heures, c'est pour lui déjà décidé que cette séance sera la sienne.

La première fois qu'il m'a raconté tout ça, j'en étais un peu perplexe et j'avais à son encontre, une mine interrogatrice. Quant à moi, quand l'envie me vient de voir un film, j'essaie tant bien que mal de choisir la qualité avant tout. Après tout, je ne veux pas gaspiller mon temps et comme on dit en blaguant « Ce navet représente deux heures perdues de ma vie que je ne peux jamais réclamer ! »

La deuxième fois qu'il m'a parlé d'un d'eux qu'il avait vu le week-end, il a ajouté que celui-ci « Ghost of Girlfriends Past » n'avait pas été de grande qualité. Dans cette quête de l'inconnu, le premier a été un grand succès à l'encontre du deuxième qui ne l'a été. Dans ce concept de prise de décision, j'ai pris avec Patrice le temps qu'il faut afin de discuter des détails de cette atypique façon de procéder dans le hall d'entrée des cinémas en vue de sélectionner un film.

Je lui ai expliqué comment je consulte toujours le site Web « Rotten Tomatoes ». Ce site cote tous les films récents d'après les opinions des critiques professionnels du cinéma. Après avoir eu la malchance de voir deux ou trois mauvais films, la malchance de gaspiller ma vie, je suis tombé sur le site « Rotten Tomatoes » et j'ai découvert que leurs cotes étaient une évaluation précise de la qualité d'un film. Par conséquent, avant de voir quoi que ce soit, j'essaie … non, je le considère comme une obligation de retrouver la cote du film d'après « Rotten Tomatoes » pour bien juger si oui ou non je devrais voir un film.

Les grands producteurs de films sont experts dans l'art de promouvoir leurs créations. Même si le film n'est guère de grande qualité, ils parviennent à créer de la publicité si pas tout à fait fausse, qui exagère les bons moments du film sans indiquer que l'ensemble de celui-ci est une perte de mon temps. « Rotten Tomatoes » me permet de comprendre la qualité d'un film d'une manière objective au lieu d'avaler la pub telle quelle sans réflexion.

Patrice n'a jamais entendu parler de ce site Web. Je lui ai envoyé un courriel dans lequel j'avais mis l'adresse du site avec l'explication que j'espérais qu'il consulterait le site et réfléchirait sur la cote avant de voir son prochain film.

À propos, la meilleure cote d'un film est 100% et le film « Ghost of Girlfriends Past » a reçu 27 %. 27 % ? Je refuse de sortir de mon appartement pour 27 % !

2009-05-11

Québec

Le Canada est un pays officiellement bilingue mais l’est-il vraiment ? Le Canada a deux héritages mais les reconnaît-on tous les deux ? Le Canada comme confédération est une union de divers groupes mais restera-il un ensemble cohérent ?

Au cours de ma vie, la question du Québec et de sa position au sein de notre pays a été soulevée à maintes reprises. En effet, je peux même dire que cette question semble sempiternelle, elle n’est jamais résolue, elle n’est jamais tranchée. Soit dans les salles de classe, soit dans les journaux, soit à la télévision, je l’ai entendue je ne sais combien de fois. Cependant, pourquoi revenons-nous toujours à ce mouton-là, à cette brebis galeuse de nos affaires patrimoniales ?

Selon le Petit Robert, une confédération est définie comme une « union de plusieurs États qui s'associent tout en conservant leur souveraineté ». Bon, si j’examine le Canada d’est en ouest, la confédération du Canada, je trouve plusieurs groupes, plusieurs états qui sont arrivés à garder leur souveraineté en tirant profit de leur association. Quels groupes ? Les provinces, bien sûr. Entre parenthèses, je ne vais pas m’embarquer dans l’affaire des autochtones, je me restreins à la question du Québec.

Je pense que je peux mettre en avant assez facilement que l’association des provinces a amélioré leurs situations individuelles, qu’elle a amélioré toutes leurs économies. En outre, le tout est plus grand que la somme des parties. L’ensemble des provinces constitué en un pays leur permet de mieux conserver leur propre souveraineté et même la souveraineté de leur confédération face à l’hégémonie économique et culturelle de notre voisin gigantesque du sud et face à la mondialisation qui met le Canada en concurrence avec tous les autres pays au monde.

Alors, où se trouve le problème ? Pourquoi revenons-nous à nos moutons pour trouver un bélier en train d’ouvrir une brèche dans la Grande Muraille du Canada ? À mon humble avis, le vrai problème entre le Québec et le reste du Canada ne réside pas dans les différences de culture et d’héritage. Il ne s’agit même pas d’un défaut d’autodétermination de la part des québécois dans le cadre du fédéralisme canadien. C’est tout simplement une question de langue. Le Québec parle français, le reste du Canada parle anglais. C’est tout. Rien d’autre à considérer.

Je peux déjà entendre les exclamations de surprise, les mots de désapprobation, voire les gloussements et le ricanement de ceux qui dédaignent cette perspective comme trop simpliste et étroite. Néanmoins, réfléchissez et laissez-moi mettre sur la table un concept fondamental pour le développement et le maintien des relations entre deux groupes de personnes.

Comment pouvons-nous entretenir de bons rapports avec quelqu’un si nous ne pouvons nous parler, si nous ne pouvons communiquer, l’un avec l’autre ? Si j’étudie les rencontres que j’ai eues à Toronto avec divers groupes ethniques, linguistiques, je vois un dénominateur commun, un lien entre ces gens et moi qui nous donne la capacité de nous entendre, de trouver un point commun pour construire un pont pour relier nos vies parfois tout à fait différentes. Si je regarde ces gens qui ont montré de temps en temps des vies diamétralement opposées à la mienne, je vois : le chinois qui pratique le taï chi dans le parc chaque matin à sept heures, le sikh qui porte un turban, le musulman qui effectue cinq prières par jour, le juif orthodoxe qui porte la kippa. Toutefois, malgré ces différences bien évidentes, nous pouvons nous parler. Nous avons un moyen de combler le fossé entre nous étant donné que nous parlons la même langue et nous pouvons nous expliquer les uns aux autres nos points de vue. Sans cette communication, qu’est-ce que je verrais ? Seulement les différences, peut-être l’étrangeté de ces vies en comparaison avec la mienne ? En un mot, sans communication, nous ne verrions que les différences entre nous sans la possibilité de nous concentrer sur les similarités entre nous.

Et maintenant, après avoir établi l’importance, à mes yeux, d’une langue partagée, retournons au Québec en nous posant la question : Comment pouvons-nous vivre ensemble si nous ne pouvons nous parler ? En dépit de toutes les langues parlées dans les divers marchés de Toronto n’importe quel samedi matin, nous pouvons toujours nous parler en anglais, la langue considérée comme universelle dans ce contexte. Cependant, si je décris la même situation au Québec, vais-je demander à quelqu’un de parler la langue soi-disant universelle des marchés de Toronto, l’anglais ? Le Québec ne pourrait-il pas me demander de parler le français ? Ah, c’est là que le bât blesse. Tous les divers groupes aux marchés du samedi matin peuvent utiliser leur langue maternelle mais ils se parlent les uns avec les autres en pratiquant l’anglais. Quelle sera la langue universelle entre le Québec et le reste du Canada ?

Au cours des années, j’ai eu des occasions d’écouter des histoires typiques d’anglophones face aux québécois. Ces histoires se sont résumées en une description de comment les anglophones n’avaient pas pu très bien communiquer avec les québécois sans expliquer clairement que les anglophones n’essayaient que de parler l’anglais et jamais le français. C’est-à-dire que les anglophones ont décidé unilatéralement que la langue universelle, la langue commune allait être l’anglais et que si les québécois ne parlaient pas anglais, c’était parce qu’ils refusaient de le parler, c’était parce qu’ils étaient « difficiles ». Il était intéressant de noter que je n’ai pas très souvent entendu un anglophone dire qu’un québécois ne connaissait pas l’anglais. Non, il ne s’agissait pas d’un manque de connaissances, c’était presque toujours une question que les québécois étaient difficiles, qu’ils refusaient de parler anglais.

Voilà, quelque unes de mes observations sur ce sujet.
  • Les Québécois ont deux bras, deux jambes, deux yeux mais seulement une tête. Ils respirent, ils mangent, ils dorment, ils mènent une vie comme n’importe qui d’autre. Je veux dire que les québécois sont des êtres humains comme moi, comme nous, comme les anglophones.
  • Les anglophones ont la fausse impression que tous les québécois peuvent parler anglais cependant, selon les statistiques, il n’y a que 41% des francophones qui sont bilingues. Cela veut dire que la majorité de francophones, la majorité des québécois sont unilingues. Remarquez que 9% des anglophones sont bilingues (anglais et français).

Est-ce que j’ai une solution ? Pas du tout. « Pantoute ! » Toutefois, au risque de vous choquer, j’aimerais parler de l’histoire de John Greg Lambton, le premier Comte de Durham.

Les Rébellions de 1837-38 ont été causées par le traitement de faveur accordé aux anglais dans la colonie britannique du Bas Canada au détriment des francophones. La couronne a envoyé au Canada le Comte pour enquêter sur les circonstances de la rébellion. Le résultat de cette visite a été un rapport dans lequel Durham a recommandé que le Haut Canada et le Bas Canada soient réunis dans le but de créer une situation où les anglophones sont majoritaires. De plus, une politique d’immigration britannique forcerait la population canadienne française à choisir la voie de l’assimilation linguistique et culturelle.

La couronne a suivi les conseils de Durham. En 1840, on a vu la formation de la Province du Canada dans l’objectif d’assimiler les Canadiens français en les submergeant dans une mer anglophone. Néanmoins, cette politique a échoué. D’abord, les Canadiens français ont réagi par la revanche des berceaux, c’est-à-dire une stratégie promue par l’Église Catholique de faire plus de bébés que les colons anglais afin de devenir supérieurs en nombre. Deuxièmement, les Canadiens français ont maintenu une forte appartenance à leur territoire et sont restés réunis. Malgré les efforts des Britanniques, les francophones n’ont pas été dispersés parmi les anglophones, les francophones comme groupe n’ont pas été divisés, ils n’ont pas été dilués. Par conséquent, en 1864, à la conférence de Charlottetown, ils ont utilisé les discussions sur la formation du Canada pour reformer une province séparée, le Québec.

Par conséquent, je peux mettre en avant que la situation telle qu’elle existe aujourd’hui serait tout à fait différente ou plutôt non existante si les conseils de Durham avaient réussi à faire assimiler les francophones dans la population anglophone. Le Québec tel quel n’existerait pas !

Pour conclure, je dois souligner que dans ce petit discours, je n’ai pas touché à tous les aspects de la question du Québec. Je n’ai même pas offert de solution, de résolution pour une affaire qui revient toujours sous forme d’un référendum sur la séparation ou d’un autre gros titre annonçant l’intention du Parti Québécois de continuer à lutter pour cette idée. Cependant, j’aimerais retourner à cette question de la langue. Quelle sera la langue universelle du Canada ? Quelle sera la langue de choix entre le Québec et le reste du Canada ? Allons-nous arriver à un point, comme dans les marchés de Toronto, où nous pouvons nous parler l’un à l’autre en employant une langue commune ? Oui, on peut mettre en avant l’anglais comme la langue de la majorité des Canadiens, pourtant le Québec peut-il mettre en avant sa propre langue maternelle ? Je prétends qu’aussi longtemps que cette question reste irrésolue, nous allons tous lire dans les journaux un autre essai des séparatistes qui veulent nous rallier à l’idée que le Québec devient pays indépendant.

2008-03-31

Le panier à fleurs suspendu


Ce week-end passé, ma femme s'est embarquée dans un projet destiné à embellir les deux loggias de notre appartement. Elle a acheté deux paniers à fleurs dans l'intention de les suspendre des garde-fous, un panier pour chaque loggia.

À première vue, cette idée a semblé assez raisonnable, assez facile. Cependant, quand elle est rentrée, elle avait en main, ou devrais-je dire en quatre mains parce que j'ai dû l'aider, deux paniers qui pesaient au moins 25 kilos chacun. Ces paniers étaient beaucoup plus grands que je ne les avais imagés. J'ai jeté un coup d'œil aux supports et je me suis rendu compte sur-le-champ que nous aurions de la difficulté à les installer.

Les garde-fous de nos loggias consistent en un cadre métallique attaché au mur. Le cadre est divisé en deux parties et chaque partie comprend un carré de verre. C'est là où se trouve le problème avec les supports. L'idée de ces supports est d'entourer la barre horizontale du garde-fou d'une attache en plastique. Il faut mettre la partie supérieure du panier, un panier fait d'un squelette en barres métalliques, et la barre horizontale du garde-fou ensemble, l'un à côté de l'autre et les attacher ensemble avec un cordon en plastique. Malheureusement, les carrés de verre remplissent presque tout l'espace vide du garde-fou et il n'y a pas de place où nous pouvons entourer la barre horizontale du garde-fou de l'attache.

Bon, cette découverte nous a amenés à une autre idée, l'idée d'un support en forme de S. Le dessus du S s'attache à la barre horizontale du garde-fou, le dessous du S s'attache à la partie supérieure du panier. Cependant, nous n'avions pas de ce type de support. Où pouvions-nous trouver un tel truc ?

Dimanche après-midi. Il faisait beau mais frisquet, je me suis décidé à visiter le magasin Canadian Tire en ville, pas loin de notre condo. J'étais certain que le support en forme de S existait, je devais tout simplement le dénicher.

Portant mes lunettes de soleil, j'ai entamé le trajet à pied. Comme toujours, il y avait du monde sur la rue Queen. J'ai foncé à travers la foule et j'ai traversé plusieurs rues y compris l'avenue University. Assez souvent, il y a un musicien quelconque au carrefour de Queen et University, toujours au coin nord-est. Cette fois, j'ai vu un écossais tout à fait habillé en costume écossais, y compris le kilt, en train de jouer de la cornemuse. Voilà, ça c'est quelque chose que je ne vois pas tous les jours. Ha !

Enfin je me suis trouvé au carré Nathan Phillips. J'aime la grandeur de cet espace et par conséquent, j'y ai marché à travers. J'ai marché autour de la fontaine et puis, au dernier moment, j'ai décidé de visiter le jardin de paix. Au milieu du carré juste à un côté, il y a le Jardin de paix qui comprend un petit jardin, une fontaine et une petite structure. Je me suis arrêté pour lire les plaques qui décrivaient l'origine du jardin. La ville de Toronto a érigé tout ça comme un monument pour la paix en 1984. Le premier ministre Trudeau a assisté à la cérémonie du commencement des travaux en mars. Le pape est venu en septembre pour bénir le projet et aussi pour verser dans la fontaine de l'eau qui provenait de la ville de Nagasaki au Japon, le site de la deuxième explosion nucléaire de la Deuxième Guerre mondiale. La reine Elise II a dédié le jardin en novembre. Pas mal de dignitaires pour un si petit jardin.

Après cette balade agréable, j'ai continué à marcher au magasin Canadian Tire où, malgré mes meilleurs efforts, je ne suis pas parvenu à trouver le bon support en forme de S. J'ai été obligé de rentrer les mains vides. Je savais que ma femme serait déçue, elle attendait avec impatience l'installation de ces paniers de fleurs à nos balcons après avoir fait pas mal de travail pour assembler ces paniers, incluant un choix divers de fleurs. Il nous fallait persévérer dans notre quête du support parfait. Nous avons perdu la bataille mais pas la guerre !

******************

À propos, laissez-moi expliquer une expression anglaise qui est employée pour décrire quelque chose de grand ou d'important. Avant le début de la guerre en Iraq, Saddam Hussein a essayé de dissuader les américains d'attaquer son pays en les menaçant d'une grande guerre, « the mother of all wars ». Depuis ce temps, cette expression est devenue très courante dans le lexique des actualités américaines, même dans la langue de la rue. S'il faut montrer l'importance ou l'ampleur d'un problème, tout ce qui est nécessaire est de préfixer le nom du problème de l'expression figée « the mother of all ... ». Par exemple, je peux appeler la crise économique actuelle « the mother of all economic crisises ». Je peux appeler la faillite de General Motors « the mother of all bankruptcies ». J'ai bien mal à la tête ? « I have the mother of all headaches. »

J'ajoute cette postface pour éclairer ma réaction initiale à ces paniers de fleurs plus grands que je ne les imaginais. Je les ai appelés « the mother of all flowerbaskets ». Bien sûr, je l'ai dit dans ma barbe, je n'osais pas le dire à haute voix par peur d'avoir l'air de critiquer ma femme. Elle a beaucoup travaillé pour assembler les paniers, quand même, ils sont plus significatifs que l'image du panier que j'ai bâtie en tête. Maintenant, je dois continuer à tenter de trouver ce mouton à cinq pattes, ce rare support S.

2009-05-31

dimanche 13 septembre 2009

Dieu

Récemment, j'ai lu un article sur un homme politique du parti conservateur dans la province d'Alberta qui avait suggéré l'ajout du créationnisme au programme scolaire. Cet homme avait expliqué d'après le journaliste comment notre société devait offrir à chaque étudiant la possibilité de voir l'alternative à l'évolutionnisme. J'ai dû glousser. Encore une fois, quelqu'un, animé des meilleures intentions, s'est montré par inadvertance tout à fait contradictoire à sa propre religion. Comment ? Si les voies de Dieu sont impénétrables, comment les créationnistes peuvent-ils prétendre connaître Dieu ?

Quand j'étais enfant, comme beaucoup dans le monde judéo-chrétien, j'allais à l'église le dimanche avec toute la famille. Nous étions protestants et je participais à une école du dimanche, une période d'instruction sur la Bible et d'autres choses religieuses. C'était dans ce cours où nous étudiions le livre de la Genèse : le monde avait été fait en six jours et le monde avait été créé il y a six mille ans. En fait, chez nous, mon père avait une Bible familiale dans laquelle je pouvais trouver des documents supplémentaires. L'en-tête de chaque page dans cette bible indiquait la date des événements décrits sur la page. Au début de la Genèse, chapitre 1, verset 1, l'en-tête montrait 4 004 av. J.-C.

À cette époque, j'étais intéressé à la science et à la science-fiction. C'était pendant mes lectures sur ces deux sujets que je suis tombé sur deux choses qui ont élucidé pour moi une vérité, la vérité.

D'abord, les dinosaures. Dans un livre de science-fiction, j'ai lu une histoire captivante sur ces animaux cependant, j'ai découvert par la suite que beaucoup de détails sur les dinosaures dans ce livre de fiction étaient vrais. Selon les experts, ces créatures avait erré sur la terre il y a 200 millions d'ans. Évidemment, cette date est bien avant la date de 4 004 av. J.-C. marquée dans ma bible.

Deuxièmement, en étudiant notre système solaire, j'ai découvert des détails curieux sur les autres planètes. Par exemple, tandis que la rotation de la terre est à peu près 24 heures, la rotation de Jupiter est un peu moins de 10 heures, celle de Mercure est presque 59 jours, celle de la planète Uranus est 17,24 heures. Tout à coup, il m'est venu à l'esprit que le concept du « jour » est basé sur la rotation de la planète et pendant que notre jour comprend 24 heures, cela ne veut pas dire que l'idée de « jour » ne peut pas être différente dans d'autres circonstances.

En plus, l'orbite de la terre autour du soleil définit notre année, c'est-à-dire, la période de 365 jours. L'orbite de la planète Uranus prend 84 ans et 7,5 jours, celle de Jupiter prend 11 ans et celle de Mercure prend 59 jours. Encore une fois, j'ai eu une révélation où le concept d'une année peut varier : notre année est 365 jours mais l'idée d'une année peut être plus courte ou plus longue selon les circonstances. J'ai même lu que la rotation de la Voie Lactée, notre galaxie est évaluée à 226 millions d'années.

Le lien biblique de tout ça ? Je reviens à la Genèse et la création du monde en six jours. Si je tiens compte de la possibilité que le temps d'un jour peut varier, pourquoi ne puis-je pas dire qu'un jour pour Dieu pourrait être le temps d'un billion d'années ? Comment peut-on fixer la période de temps à 24 heures ? Je pense que c'est trop simpliste, je pense que cette idée étroite, cette idée où la race humaine est le centre de l'univers, ne considère pas d'autres possibilités.

J'imagine que maintenant, vous voyez ce que je pensais quand j'étais enfant. Tout à coup, l'histoire de la Genèse et l'explication des dinosaures cadraient ensemble très bien. Quand la personne a rédigé la Genèse, quand cette personne a copié l'histoire et a employée l'expression « en six jours », elle parlait de six jours de Dieu, non pas six de nos jours et un jour pour Dieu n'est pas comme un jour pour nous. Voilà, nous avions notre Genèse et la création en six jours et en plus, nous avions les dinosaures. Ça sautait aux yeux ! Ce n'était pas question de la fausseté de la Bible, mais plutôt, de son interprétation.

Je me rappelle que j'étais très intéressé par cette révélation et je voulais en parler avec mon instructeur de mon école du dimanche. Il a refusé. Il devait suivre le programme scolaire exigé et il ne voulait pas, il ne pouvait pas parler de mes idées qui étaient tout à fait hors de programme. Le résultat ? Je suis devenu désenchanté de l'école du dimanche et chaque dimanche, quand toute la famille allait à l'église ensemble, mon père et ma mère participaient au service et moi, censé aller à l'école du dimanche, faisais l'école buissonnière. Hé ! Une chose en amenant une autre, d'abord les dinosaures, puis la délinquance. Ha !

Aujourd'hui, après y avoir réfléchi, j'ai d'autres commentaires à donner sur la question du créationnisme.

J'entends de temps en temps que nous sommes tous les enfants de Dieu. Bon, qu'est-ce qu'un parent dit à un enfant ? Est-ce qu'un parent explique la théorie atomique à un enfant ? Je pense que non. Si je reviens à cette idée que nous sommes les enfants de Dieu, est-ce que Dieu, notre parent, nous a expliqué tout ? Nous a-t-il expliqué la théorie atomique ? Je pense que non. Il nous a laissés la découvrir nous-mêmes, quand nous étions prêts, quand nous avions la maturité de la comprendre.

Les voies de Dieu sont impénétrables. Si c'est vrai, comment peut-on dans n'importe quelles circonstances prétendre connaître la volonté de Dieu ? Si on dit une chose pareille, je dois le considérer comme le comble de l'arrogance, de la prétention. Un être humain, un être si simple, si petit, peut-il prétendre connaître, comprendre, saisir l'étendue de Dieu, de sa volonté, de son plan dans l'univers ?

J'ai entendu parler d'un livre de science-fiction, malheureusement je ne l'ai jamais lu, où l'histoire décrit l'arrivée d'une race d'extra-terrestres si avancés que leur niveau de développement en comparaison du notre est comme notre niveau de développement en comparaison de celui des fourmis. Pouvons-nous imaginer la race humaine d'un point de vue où notre stade de développement n'est pas si avancé, que nous ne sommes que des fourmis ? À cause de notre point de vue si étroit face à l'univers, nous pensons toujours que nous sommes au sommet de la chaîne alimentaire et nous avons de la difficulté, non, nous sommes incapables de voir la possibilité qu'il y a quelque chose au-delà de notre niveau d'existence. Le monde a été créé il y a six mille ans ? Dieu, notre père nous a raconté, à nous les enfants, une histoire simple parce qu'il croyait que nous n'avions pas la maturité, le développement d'esprit de comprendre autrement. Je vois que même aujourd'hui, il y a des gens qui ont tellement de difficulté à accepter, à considérer cette idée. Il n'y a pas de Père Noël ? Dieu voulait dire autre chose que six jours ? Parfois la vérité est difficile à comprendre, difficile à avaler.

2009-08-18

Comme le monde est grand

Nous connaissons tous le dicton « comme le monde est petit ». Je pense que nous avons tous une histoire dans laquelle nous avons vécu des moments insolites comme rencontrer quelqu'un que nous n'avions pas vu depuis belle lurette ou encore rencontrer quelqu'un que nous connaissons très bien soit un voisin, soit un ami.

Cependant, chaque jour je suis frappé par l'observation que l'opposé est aussi vrai : le monde est grand. La population mondiale est maintenant estimée à 6,7 milliards d'habitants. Chaque fois que j'allume le téléviseur pour voir les actus, je peux voir qu'il y a toutes sortes de choses qui se passent partout dans le monde. Chaque fois que j'emploie mon ordinateur pour fureter sur Internet, je peux voir le résultat des efforts d'une myriade de personnes, un nombre incalculable de pages web. Il m'est tout à fait impossible de prétendre que je puisse me tenir au courant de tout. Je me sens parfois accablé d'une surcharge d'information ou si je peux emprunter un terme psychologique, une surcharge sensorielle. Si je regarde dans n'importe quelle direction, et j'emploie le mot « direction » dans un sens figuratif parce que je parle de la télévision, l'Internet, les journaux, je peux être informé de beaucoup de choses que je ne connaîtrais pas sans tous ces médias. Je trouve que c'est étonnant comment je peux voir tellement de choses que je n'ai jamais vues. Il me semble qu'auparavant, je n'avais aucune idée de la grandeur du monde, du nombre de personnes qui existaient, de la quantité énorme d'événements qui avaient lieu tous les jours.

Comment puis-je suivre tout ça ? La bonne réponse est évidemment que je ne peux suivre tout ça. Je suis obligé de faire un choix et je dois me limiter à ce choix. Sinon, je vais en être submergé.

De temps en temps, dans un moment de rare liberté, j'ai l'occasion de faire quelque chose que je ne fais pas régulièrement. Cette fois, il s'agissait de fureter sur Internet.

« Car Surfing », le surf sur une voiture. Au hasard, je suis tombé sur une mention de cette expression quelque part et j'ai cherché des détails en employant le moteur de recherche Google. Le voilà, des clips sur ce phénomène. Il s'agit de monter sur le toit d'une voiture en marche et de prendre la position d'une personne qui fait du surf, debout sur une planche de surf. Bon, nous avons une image très amusante, le truc fun des ados. Le problème ? Qu'est-ce qui va arriver si le chauffeur arrête ou si le chauffeur fait un virage ? Mince alors, j'ai vu une séquence où une espèce d'idiot, et il n'y pas d'autre expression pour décrire le bonhomme sur le toit de la voiture, a perdu son équilibre et est tombé sur la route. Heureusement, la voiture n'allait pas à la vitesse grande V toutefois ce gars n'allait pas exactement bien par la suite. En fait, à plusieurs reprises un des ses amis lui a demandé s'il voulait qu'on le conduise à l'hôpital mais je dois ajouter ici que ces offres d'aide se faisaient parmi des grands éclats de rire.

Une pensée m'est passée par la tête sur les cascadeurs professionnels qui font des cascades dangereuses dans l'objectif d'y échapper sain et sauf. Dans ce cas de car surfing, il est plutôt question du film Jackass. Ce film américain, célèbre parmi les jeunes, consistait en des cascades effectuées par des non professionnels, par des jeunes hommes de la vingtaine. Je n'ai jamais vu le film, mais j'en ai entendu parler et j'en ai vu des clips. Mon impression en était que je voyais des tours bêtes, stupides, ridicules, faits par un groupe d'adolescents sans beaucoup de préparations ni mesures de sécurité. Le but de tout ça ? Rire, tout simplement pour rire. On regarde ces tours en se disant en soi-même, comment a-t-on même pensé à un tel tour parce qu'il s'agit de quelque chose de tellement bête et de parfois si dangereux.

Ah, mais c'est là où gîte le lièvre. Il est question de tenter le diable ! Moi, à mon âge, je pense à la possibilité de blessures. À vingt ans, on pense aux rires. Je pense que ça, c'est l'explication de pourquoi il y a beaucoup plus de jeunes hommes qui entrent dans la guerre. Battre, c'est le jeu d'un jeune homme. Mais, ça c'est une autre histoire pour une autre occasion.

« Hydrospeed » ou en anglais Riverboarding a aussi capté mon attention. Cette nouveauté, nouvelle au moins pour moi, consiste à descendre des rapides sans kayak. Oui, sans kayak, sans embarcation ! Habillé en combinaison de plongée, on s'allonge sur une demi-planche de surf sur la poitrine en employant des palmes pour se guider dans l'eau vive. Apparemment, la combinaison de plongée et parfois l'ajout de genouillères et coudières servant à se protéger des rochers dans l'eau vive.

J'ai fait du rafting, j'ai manié une pagaie pourtant je n'ai jamais fait une chose pareille. Ce prétendu sport a fait ses débuts en France à ce qu'il paraît et maintenant il fait fureur aux États-Unis dans certaines sphères de la société, pour les ados sportifs j'imagine.

En janvier, plusieurs membres de ma famille y compris votre serviteur nous avons essayé l'Accrobranche. L'idée est de glisser à l'aide d'un système de poulies sur des câbles tenus entre des arbres à une hauteur de 3 ou 4 mètres. On est suspendu par des poulies à un harnais. Par curiosité c'est une question à poser de comment on est parvenu à cette idée. Quand je regarde un arbre, la combinaison d'une poulie, d'un câble et d'un harnais n'est pas la première chose qui me vient à l'esprit.

C'est la même question pour l'hydrospeed. Qui a fait le lien entre le rafting dans l'eau vive et une planche de surf ? Un saut d'imagination ? Un brin d'inspiration ? Un manque total d'un sentiment de sécurité pour soi-même ? Ha ! Je dois glousser en tentant de me réfléchir à la personne qui y a pensé la première parce que je me rappelle une combinaison de question et réponse cocasse. « Pourquoi avez-vous grimpé cette montagne ? » et la bonne réponse est « Parce qu'elle était là. »

« Pourquoi franchir les rapides avec une demi-planche de surf ? » Pourquoi pas ?

2009-08-05

La Danse

Depuis un certain temps, ma femme exprimait le désir que nous nous inscrivions à un cours de danse. Bien que je n'aie jamais pris au sérieux l'idée de me voir à une leçon de danse, je suis arrivé à un point dans ma vie où je suis prêt à toujours répondre à n'importe quelle offre « Pourquoi pas ? ». Comme dans le film « Sans plus attendre » (The Bucket List) où les protagonistes ont dressé une liste de choses à faire avant de mourir, je me suis décidé à saisir les occasions qui se présentent pour que je ne me dise pas un de ces jours que j'ai raté le coche.

Elise fit des recherches et trouva une école dans le quartier de la Distillerie qui s'appelle « Dance District ». En novembre 2008, nous commençâmes notre incursion dans la danse avec l'objectif spécifique d'apprendre deux ou trois pas pour être capable de nous mouvoir ensemble sur la piste de danse pendant notre croisière en janvier 2009. Bon, trois mois de leçons hebdomadaires, assez de temps pour transformer deux grenouilles en prince et princesse dansants ?

Je devrais ajouter ici que tout le monde a dansé à tel ou tel moment. Cependant, si on pense à une discothèque, à une boîte de nuit, la plupart du temps, un couple danse à part, chacun faisant ses propres pas. Au contraire, la danse de salon se danse en couple, on ne danse pas chacun de son côté. Il y a des règles du jeu, chacun a son propre rôle dans le cadre d'un couple et le but est de danser ensemble d'une façon coordonnée.

Notre instructrice, Isabelle, se montra très compétente. Polonaise de souche arrivée au Canada depuis 10 ans pour finalement réussir à mettre sur pied sa propre affaire; chapeau, très courageuse !

Moi, je n'avais aucune idée de quoi faire. Je partais bien de zéro. Toutefois, je découvris qu'Isabelle avait une manière amicale mais ferme avec ses étudiants. Elle était instructive et très patiente. Je souligne sa patience parce qu'Elise et moi étions un peu maladroits, surtout au début.

Je dois glousser en y pensant. Au début de l'instruction, je n'avais pas d'idée claire de comment la danse fonctionnait. Je ne l'avais jamais faite, je n'avais pas d'expérience semblable avec laquelle je pouvais comparer. Néanmoins, Isabelle nous fit remarquer deux ou trois fois que nous avions tous les deux un bon sens du rythme. Même si nous ne savions pas les pas, nous pouvions entendre correctement la musique et l'interpréter.

Isabelle nous apprit la rumba pour notre première danse. Elle pensait que c'était une des danses les plus simples, un pas un peu plus lent et plus facile à suivre. Elle nous dit aussi que l'apprentissage devient plus facile avec l'expérience. Au moment où j'écris, après huit mois d'instruction, je dois admettre qu'elle a raison. Nous sommes loin d'être experts en danse, pourtant je peux remarquer que maintenant, nous comprenons un peu mieux l'instruction d'Isabelle et apprendre un peu plus facilement de nouveaux pas.

Dès le début, Isabelle essaya bien de clarifier les rôles que chacun de nous avait dans la danse. L'homme mène, la femme suit. L'homme commence toujours du pied gauche, la femme commence toujours du pied droit. C'était ici qu'elle plaça une petit blague en anglais : la femme commence toujours du droit (the woman always starts on her right) parce que les femmes ont toujours raison (because women are always right).

Pendant chaque leçon, Isabelle ajoutait petit à petit un peu de sa propre philosophie sur la danse. Ce fut à travers cette idée de la danse que je commençai à voir la danse comme une métaphore de la relation homme femme.

L'histoire nous a montré des rôles de l'homme et de la femme plutôt traditionnelle : l'homme est agressif, la femme est passive. Toutefois, l'âge moderne met surtout en avant l'importance d'un changement de ces rôles où nous voyons un homme assuré et une femme réceptive. Nous avons troqué l'agressivité et la passivité contre l'assurance et la réceptivité. Au lieu de suivre une politique sexuelle basée sur la domination, nous avons entamé une politique d'égalité, un partenariat. C'est ça dont Isabelle nous a parlé. Dans la danse, oui, l'homme a le rôle de leader. Il mène, la femme suit. Cependant, Isabelle a souligné qu'il y a toujours un choix dans la danse. L'homme offre à la femme de danser, la femme a toujours le choix d'accepter l'offre ou de la refuser. Il n'y a pas de question de domination, c'est un partenariat. Une fois que l'offre est acceptée, c'est là où commence la danse.

Dans ces rôles, Isabelle pointa l'importance de la politesse et du respect dans la danse. Si vous me permettez de redire ce qu'elle a dit en mes propres mots : la différence est la déférence avec laquelle l'homme traite une femme.

Et bien sûr, l'ironie d'avoir une femme comme instructeur de danse ne m'échappait pas. J'ai blagué en disant qu'à l'âge de 56 ans, je me faisais apprendre à être un homme par une femme.

Isabelle a aussi fait mention d'un autre aspect de la danse très important pour l'homme. Pour bien danser, l'homme doit avoir de l'assurance et il doit savoir ce qu'il fait. Il m'est venu à l'esprit que sans savoir ce qu'on fait, il pourrait être tout à fait impossible d'avoir de l'assurance. C'est amusant comment Isabelle a présenté l'idée que l'homme a parfois un rôle plus important dans la danse parce qu'il a la responsabilité de mener la femme, d'être le leader du couple et il doit savoir ce qu'il fait et il doit le faire avec de l'assurance. Hé, pas de pression !

Je dis à ma femme en plaisantant que je vois maintenant que ce ne sont que les vrais hommes qui savent danser. Je plaisante en disant ça ? Peut-être que c'est vrai ! Compte tenu de la liste d'exigences : confiance en soi, s'y connaître en danse, respectueux, poli ... mince alors, il faut vraiment être un homme, un vrai homme pour être en mesure de danser. Ha ! Et tous les hommes ont toujours pensé que savoir danser est un signe d'une mauviette, d'un gay. Au contraire !

Jusqu'ici, ma femme et moi avons appris un peu des danses suivantes : la rumba, la valse, le slowfox, le tango, le swing et le merengue. Évidemment, nous ne sommes pas du tout des experts en la matière, pourtant nous nous amusons bien et pour le moment, nous continuons. Je fais sourire Isabelle encore quand je lui dis que Fred et Ginger, en faisant référence à Fred Astaire et Ginger Rogers, n'ont pas de quoi s'inquiéter concernant leur réputation du couple dansant le plus célèbre. William et Elise ne visent pas à les remplacer. Ha !

2009-07-09